L’incident Russo-Ukrainien de la mer d’Azov et le cessez-le-feu

On aurait pu croire que cet incident ravive les tensions et fasse voler en éclat la fragile accalmie qui fait office de cessez-le-feu.

Rien de cela pour le moment. Le nombre de violations et d’explosions quotidiennes a plutôt diminué ces derniers jours, suivant les rapports disponibles de l’OSCE. Ces violations et explosions quotidiennes restent dans une fourchette similaire aux dernières semaines: entre une centaine et quatre cent par jour.

C’est toujours un cessez-le-feu fictif, sans leadership clairement défini, avec des acteurs plus intéressés dans le paraître que dans l’action.

  • Le SMM (Special Monitoring Mission to Ukraine) continue à se présenter comme le responsable en charge de la supervision du cessez-le-feu tout en se limitant à un rôle passif d’observateur et attendant que tous ceux dont le rôle est occulté fasse à sa place ce qu’il ne fait pas : amener les acteurs à gérer un vrai cessez-le-feu en les gérant “à la culotte”, même si personne à l’OSCE ne semble considérer  que cela aurait du être leur rôle. Toujours une multitude d’actions plus ou moins utiles. Par exemple, quelques observateurs à un point de la frontière russo-ukrainienne indiquent de temps à autre qu’ils ont vu passer un convoi “humanitaire”, sans avoir pu l’inspecter. Oui, et alors? A quoi cela sert-il ? Cela ne sert pas à contrôler la frontière tout en laissant croire qu’elle est “contrôlée”. Le contrôle d’un ou deux points sur la frontière ne permet pas de contrôler une frontière. Il vaut mieux laisser des choses inutiles, mais cela ne sert presque à rien. Nous n’avons pas connaissance d’une identification précise et incontestable de la nationalité des combattants sur le terrain par le SMM, pas plus que les flux réels de matériel militaire venant de Russie, et ce ne sont pas ces points d’observation sur la frontière qui donneront la moindre information fiable.
  • Le JCCC (Joint Centre for Control and Coordination) ne fait plus  beaucoup parler de lui depuis que les officiers russes sont partis. Nous n’avons pas de nouvelles fraîches de ce qu’il fait encore. Mis à part que le SMM ne manque pas de lui déléguer des actions, sous le mode YA QUA, FAUT QUON, son rôle est occulté. Il semble fonctionner, dans l’ombre. Peut-être le seul dispositif temps réel de supervision qui “marchotte”.  Je n’ai toujours pas compris qui, du SMM ou du JCCC, fait réduire les incidents quand cela dégénère. Ce n’est pas en attendant que les rapports SMM soient publiés qu’on peut espérer une action sur le terrain. Cela passe forcément par des officiers de liaison des deux camps et une supervision qui devrait exister sous la forme de PC opérationnels qui n’ont pas d’existence officielle dans les rapports communiqués par le SMM. Cela manque de comprendre qui est en charge de cette action de supervision et de coordination auprès des forces en présence. Il n’y aura pas de cessez-le-feu qui tienne sans des supervisions déportées quadrillant le terrain.
  • Le Groupe de Contact et ses diverses commissions continuent probablement à faire acte de présence: ils ont produit tant d’accords qui se superposent les uns aux autres et dont pratiquement aucun n’est complètement appliqué que c’est devenu un nœud gordien qu’il serait bon de trancher suivant la méthode d’Alexandre le Grand, histoire de tout remettre à plat. Action de type Éléphant dans un magasin de porcelaine pour donner une idée imagée de ce qu’il faudrait faire à l’ensemble des accords existants qui prétendent régir la vie sur le terrain et n’ont pas abouti à un  cessez-le-feu durable.
  • Où est le responsable de tous ces acteurs du cessez-le-feu ? On ne le voit pas, comme s’il n’y en avait pas: chacun joue des apparences pour donner l’impression qu’il est l’interlocuteur essentiel tout en se défilant sur les autres dès qu’il y a une remarque ou le simple constat que rien ne permet de dire qu’il y a un cessez-le-feu, si ce n’est qu’il reste fictif.

28 Novembre 2018

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