La question n’est pas de savoir si la guerre va reprendre mais quand.
L’actualité n’en parle pratiquement plus, mais tous les jours il y a plusieurs dizaines de violations du cessez-le-feu avec des centaines de coups de tous calibres échangés. Le cessez-le-feu est de plus en plus fictif.
Depuis la mi-mai 2016, c’est une escalade progressive.
Le système de maintien du cessez-le feu ne fonctionne pas : ni le SMM (Special Monitoring Mission for Ukraine) représentant les observateurs OSCE, ni le JCCC (Joint Center for Control and Coordination: instance Ukraino-russe composée de représentants militaires des deux camps) ne contrôlent la situation.
Des accords de Minsk, peu de choses ont été réellement appliquées:
- une partie des échanges de prisonniers a eu lieu,
- des armements lourds ont été retirés mais se retrouvent de plus en plus souvent dans la zone de sécurité
- les élections locales paraissent lointaines: comment peut-on espérer des élections justes au milieu d’une véritable armée locale et une restriction complète des libertés d’expression
Devant l’impuissance à faire respecter le cessez-le-feu, l’OSCE parle maintenant de police armée. Est-ce réaliste ? Chaque fois qu’on ajoute aux forces armées sur le terrain une force de police, parachutée, sans légitimité, avec des policiers ne parlant pas ou peu la langue locale, sous-armée par rapport aux milices locales, elle n’atteint jamais ses buts. Pourquoi voulez-vous que ce soit différent en Ukraine qu’ailleurs ?
Une simple péripétie de cette guerre, sans guerre généralisée ? On peut l’espérer, mais la situation est devenue volatile et très instable, de plus en plus imprévisible.
Quant à un règlement final ? 8 ans plus tard le conflit géorgien n’a pas vraiment évolué. Sauf miracle, que nous ne voyons pas venir, il en sera de même dans 8 ans pour le conflit ukrainien.
Le pire ? le gouvernement ukrainien a érigé une véritable frontière avec les régions des séparatistes. Pour survivre ils sont obligés de se couper de l’Ukraine et de s’organiser avec LE pays voisin : la Russie.
Séparatisme renforcé par le comportement du gouvernement ukrainien. Plus le temps passera, plus ces territoires seront organisés différemment du reste de l’Ukraine.
On aurait pu imaginer de le gérer administrativement par un tiers comme une sorte de tutelle passagère pour calmer les esprits, l’Ukraine faisant peur quand elle parle de gérer ces territoires et la main mise russe hypothéquant l’avenir. Mais cela aurait demandé une volonté des pays européens qui leur fait défaut. Ils attendront le pire pour prendre des décisions qui arriveront trop tard et n’auront plus l’effet escompté.
En attendant, il y a risque de reprise des combats à une échelle plus importante, sans espoir de victoire militaire dans un sens ou dans l’autre.
Voyez le site de l’OSCE. Bien qu’incomplet il donne une bonne idée de l’escalade en cours.
Paris, le 7 Juin 2016